Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/414

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Un sourire énigmatique passa sur les lèvres du Japonais.

— Eh ! Eh ! Cela fait trois navires ! Cela vaudrait la peine…

— Que signifient tes paroles ?

— Rien pour toi, beaucoup pour moi. Mais je reviens à notre affaire. À bord du Varyag, se trouve une jeune fille…

— Blanche ?

Kuroki hésita une minute, puis prenant son parti :

— La fille chérie d’un de ces Européens qui se croient nos maîtres.

— Bien, seigneur, continue, gronda le gouverneur avec un éclair sinistre dans les yeux.

— Sur le bâtiment russe personne ne peut rien contre elle ; mais une fois à terre, elle est justiciable de ton autorité.

— Je comprends. Elle débarquera ?

— Oui.

— Et mes toupous (agents de police) l’enlèveront.

— C’est cela ; mais sans lui faire aucun mal.

— Sans mal ?

— Car elle doit être remise saine et sauve à mon frère Oraï, ici présent, qui, lui, l’immolera, sur les autels du Boudha des Malais, que cette audacieuse a insulté.

Un large rire distendit les lèvres du Coréen. Pas plus que la Chine, la Corée ne connaît la foi profonde. La religion est une grimace, quand elle n’est pas un moyen. Cependant il répondit :

— Ce sera fait, je te le jure sur le Dragon. Puis par réflexion.

— Comment la reconnaîtrai-je ?

— Oraï restera près de toi.

— Et toi, seigneur ?

— Avec mon navire, je vais stationner à Chefou, où se concentre l’escadre de notre amiral Uriu.

S’il se produisait quelque imprévu ; si, par exemple, les Russes manifestaient l’intention de quitter le port…

— Eh bien ?…

— La ligne télégraphique relie Chemulpo à Chefou ?

— Oui, seigneur.

— Un télégramme pour m’avertir.

— Ce sera fait, Samouraï.

— J’y compte.