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Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/436

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— Elle mourra, comme toi-même, comme tes matelots, tes navires. Elle sera fauchée comme la puissance moscovite le sera par les moissonneurs de l’Empire du Soleil-Levant.

Toute la mégalomanie qui affole un peuple incontestablement brave, mais qui ne dispose pas du nombre indispensable à la réalisation de ses vastes projets, vibrait dans cette phrase.

Le commandant du Varyag n’insista plus.

Il laissa Kuroki reprendre place dans son canot, retourner auprès des siens.

Avisant alors Albin qui, anxieux, attendait à quelques pas, il vint à lui :

— J’ai essayé de la sauver… murmura-t-il. Ces gens sont inflexibles.

— Alors, nous mourrons ?…

— À trois heures.

— Merci, commandant.

Et les deux hommes se séparèrent.

Seulement, vers deux heures et demie, une embarcation du croiseur français Pascal accosta le Varyag.

L’officier qui la commandait remettait une lettre au commandant russe et aussitôt le canot s’éloignait.

Le destinataire lut :

Chemulpo.

« Mon cher collègue, à mon grand regret, je ne puis prendre sur moi de vous accompagner au feu, mais je puis offrir asile à ceux des vôtres qui survivront. Dès que vous vous mettrez en marche vers vos ennemis, je ferai descendre tous mes canots à la mer, le Gueydon agira de même. Donc, après avoir fait tout votre devoir, efforcez-vous de vous rapprocher du port. Vous y trouverez pour vous, les vôtres, secours et asile parmi vos frères français.

« Le capitaine de frégate, commandant le Pascal,
« Sénès. »et le Pascal

— France, Russie ! murmura l’officier. Amitié maintenant, victoire plus tard.

Puis, remarquant Albin et Daalia qui, penchés sur le bastingage, rêvaient tristement, chacun préoccupé