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Page:Ivoi - Millionnaire malgré lui.djvu/441

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MILLIONNAIRE MALGRÉ LUI.

On eût cru se trouver dans un magasin d’imagerie sacrée. Vélins enluminés, émaux, miniatures, triptyques, s’alignaient, se superposaient.

— Si ces dames veulent bien prendre la peine de faire un choix ? murmura respectueusement la domestique.

— Oh ! ma bonne Macelle Lisbe, venez à mon secours, s’écria Mona.

Il y en a trop, jamais je ne me déciderai.

— Ah ! Ah ! J’avais donc raison. Et moi, qui ne connais rien à ces choses-là…

— Vous vous calomniez…

— Je n’oserai jamais désigner pour Mme Olga.

Mona parut prête à pleurer.

— Et je serai grondée.

— Pourquoi ? Il n’y a pas de votre faute, si le pope est sorti.

— Certes non, mais tante est très inquiète de ce qui se passe en Mandchourie, et elle veut, ce soir même, commencer les prières qui appelleront la protection sur ceux que nous aimons.

Puis s’adressant à la servante qui assistait, imperturbable, à ce débat :

— Toutes ces images sont saintes ?

— Et bénies par le procurateur du Saint Synode.

Mona eut un cri de triomphe :

— Là, Macelle Lisbe, vous voyez. Toutes sont également bonnes pour la prière. Le choix est simplement une opération de goût, et comme vous avez un goût excellent…

Lisbe daigna sourire.

Mal lui en prit, car Mona, certaine à présent de ses bonnes dispositions, la saisit par la main, l’entraîna au fond de la petite salle, et la plantant face au mur, devant la légion de saintes Figures :

— Macelle Lisbe, je vous en prie, désignez celles qui vous plaisent davantage.

Flattée de l’importance que lui attribuait son élève, si indisciplinée d’ordinaire, la lourde personne s’arma de son face-à-main, et consciencieusement se mit à examiner les images.

De temps à autre, elle en désignait une (et il faut bien le reconnaître, celle-ci était toujours des plus brutalement enluminées) en disant :

— En voici une qui tout à fait attrayante à mon regard apparaît.

Cinq fois elle répéta le geste et la phrase, sans qu’une réponse lui parvînt.

Un peu surprise, elle se retourna enfin en murmurant :

— Ne partagez-vous pas mon avis ?