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Page:Jacques Bainville - Les Dictateurs.djvu/290

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serait l’hitlérisme ? Il faut avoir entendu, pendant la campagne électorale de 1933, les chansons, les hymnes, les représentations dramatiques, l’esquisse d’un art radiophonique où le bruit et la musique avaient plus de part que les mots, les discours ponctués à coups de grosse caisse, pour savoir à quel degré de frénésie peuvent atteindre les foules allemandes assemblées. Hitler et Gœbbels sont de grands orateurs. Gœbbels se tient dans un registre toujours très élevé, où sa voix infatigable promet, avec une force quasi inhumaine, le bouleversement social et la reconstruction de la germanité. Hitler commence ses discours sur un ton à peu près normal, puis sa voix devient rauque, plus forte, perd toute apparence humaine, et il continue de parler, comme enivré du son de ses paroles, et soumettant ses auditeurs à on ne sait quelle incantation barbare. Le nom de l’Allemagne revient toutes les dix phrases, au cours de ces interminables allocutions, comme un refrain. La collaboration de l’orchestre est à chaque instant requise, comme celle, soudain, de chœurs gigantesques qui célèbrent les héros tués par les Français, ce Horst Wessel perdu de vices, ce Schlageter probablement espion, devenus l’Harmodius et l’Aristogiton de la Germanie, le Castor et le Pollux du Troisième Reich.