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Page:Jacques Bainville - Louis II de Bavière.djvu/109

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à sa table d’augustes personnages. Mais lui-même n’était pas dupe du jeu, ajoutait avec un sourire : Louis XIV et Marie-Antoinette sont les plus agréables des hôtes ils s’en vont dès que j’ai le désir qu’ils s’en aillent. » Reste à savoir s’il est encore permis, à quarante ans, de jouer de cette façon-là, même avec de l’ironie.

Et il ironisait toujours, mais terriblement, quand il abusait de son privilège royal pour tout dire, la vérité à ses ministres, leur secrète pensée aux solliciteurs et aux courtisans : et cela non plus ne lui fut pas pardonné. On l’accusa d’avoir tué un de ses domestiques parce que, dans un mouvement de colère, il avait violemment, — et involontairement peut-être, — serré le malheureux entre deux portes. Et il ordonnait aussi à l’un de ses valets de chambre de ne paraître devant lui qu’avec un masque afin de cacher sa laideur, laideur morale sans doute, plutôt que physique. Un autre devait porter sur son front un cachet de cire en signe qu’il avait l’entendement fermé : jeux de prince shakespearien encore.

Et dans toutes les extravagances des dernières années, qui ressemblaient d’ailleurs parfaitement aux simples excentricités des débuts et qui servirent néanmoins à conclure à la démence, on doit se demander aussi quelle était la part de la plaisanterie. Quand Louis II ordonnait qu’on jetât un ministre, un secrétaire ou un valet aux oubliettes, n’était-ce pas de la raillerie glacée ? On reste libre de le croire, puisque jamais Louis II ne s’étonna de revoir ses condamnés, ne s’enquit du lieu, de l’heure, du détail de l’exécution. Pareillement, lorsqu’il déclarait qu’il finirait par établir chez lui l’étiquette de la cour de Chine, est-on bien sûr qu’il ne s’agissait pas d’une moquerie ?

Mais ce sont peut-être les fantaisies de sa garde-robe qui