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Page:Jean Charles Houzeau - La terreur blanche au Texas et mon évasion, 1862.djvu/80

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pensées. C’est une inquisition dont les membres sont à la fois juges et bourreaux. Ils exécutent leurs décrets dans l’obscurité, comme s’ils avaient honte de leurs hauts faits. Ils brisent les portes à minuit, garrottent la victime avant de l’interroger, et, le pistolet au côté, le couteau de chasse à la main, se rangent silencieusement autour de l’accusé, cachés sous la cape mystérieuse et sinistre des pénitents noirs. Dans ces occasions, toute résistance, toute représentation, toute considération est vaine. Je résolus donc d’épargner à notre gouvernement la peine de réclamer une indemnité pour ma personne, et, avec l’aide d’un ami, je me mis à faire mes préparatifs de départ.

Ma fuite étant décidée, je voulus du moins qu’elle fût utile à la cause de la liberté. Je savais que la société unioniste de San Antonio cherchait depuis quelque temps à faire parvenir un mémoire au président des États-Unis et à son cabinet. Plusieurs voyageurs en avaient déjà emporté des copies, par voie de Castroville et de l’Eagle Pass ; mais, effrayés des dangers de l’entreprise, ils avaient détruit sur la route les papiers dont ils s’étaient chargés. Je fis offrir de prendre une nouvelle copie du mémoire, résolu de ne point m’en dessaisir quoi qu’il pût arriver. L’offre fut acceptée avec empressement, et l’on m’annonça pour le milieu de la nuit la remise du précieux manuscrit, écrit fin et serré sur du papier pelure, cousu ensuite dans une cartouche de toile du calibre de mon fusil.

Je passai la soirée à écrire mes lettres, et à faire le triage de mes papiers. Je ne pouvais emporter ni un livre ni un cahier de notes. Je fus réduit à brûler une