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Page:Joseph Louis de Lagrange - Œuvres, Tome 9.djvu/11

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différentiel, tel qu’on l’emploie, on considère et on calcule en effet les quantités infiniment petites ou supposées infiniment petites elles-mêmes, la véritable métaphysique de ce Calcul consiste en ce que l’erreur résultant de cette fausse supposition est redressée ou compensée par celle qui naît des procédés mêmes du calcul, suivant lesquels on ne retient dans la différentiation que les quantités infiniment petites du même ordre. Par exemple, en regardant une courbe comme un polygone d’un nombre infini de côtés chacun infiniment petit, et dont le prolongement est la tangente de la courbe, il est clair qu’on fait une supposition erronée ; mais l’erreur se trouve corrigée dans le calcul par l’omission qu’on y fait des quantités infiniment petites. C’est ce qu’on peut voir aisément dans des exemples, mais dont il serait peut-être difficile de donner une démonstration générale.

Newton, pour éviter la supposition des infiniment petits, a considéré les quantités mathématiques comme engendrées par le mouvement, et il a cherché une méthode pour déterminer directement les vitesses ou plutôt le rapport des vitesses variables avec lesquelles ces quantités sont produites ; c’est ce qu’on appelle, d’après lui, la Méthode des fluxions ou le Calcul fluxionnel, parce qu’il a nommé ces vitesses fluxions des quantités. Cette Méthode ou ce Calcul s’accorde, pour le fond et pour les opérations, avec le Calcul différentiel, et n’en différe que par la Métaphysique, qui paraît en effet plus claire, parce que tout le monde a ou croit avoir une idée de la vitesse. Mais, d’un côté, introduire le mouvement dans un calcul qui n’a que des quantités algébriques pour objet, c’est y introduire une idée étrangère et qui oblige à regarder ces quantités comme des lignes parcourues par un Mobile de l’autre, il faut avouer qu’on n’a pas même une idée bien nette de ce que c’est que la vitesse d’un point à chaque instant lorsque cette vitesse est variable, et l’on peut voir, par le savant Traité des fluxions de Maclaurin, combien il est difficile de démontrer rigoureusement la Méthode des fluxions et combien d’artifices particuliers il faut employer pour démontrer les différentes parties de cette Méthode.

Aussi Newton lui-même, dans son Livre des Principes, a préféré,