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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/257

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LE RETOUR DE L’ÎLE DU DIABLE


su gré ni de la modération de ses premiers actes[1], ni d’avoir conservé à l’État-Major le général Brault et à son cabinet le général Davignon, ni même d’avoir suivi les tableaux de classement tant pour les promotions que pour les décorations, ce qui avait valu « automatiquement » la croix à Lauth, au grand scandale des revisionnistes[2]. Les intéressés eux-mêmes ne lui tenaient aucun compte de son imprudente promesse qu’il s’opposerait aux « représailles », alors que Waldeck-Rousseau eût voulu laisser planer le doute, ni piquer davantage les coupables ni les tirer d’inquiétude[3]. Tout ce corps d’officiers avait été trop secoué depuis deux ans, trop violemment projeté dans la politique, pour s’arrêter brusquement. Et non seulement les généraux ne s’appliquaient pas à ramener le calme, comme ils y avaient été invités[4], mais plusieurs excitaient leurs subordonnés, annonçaient que les jours du « ministère Dreyfus » étaient comptés et regardaient vers Mercier comme vers leur vrai chef. Il fallut se décider à frapper en haut : d’abord Zurlinden, puis Négrier.

Bien que Zurlinden restât correct dans le service, il n’y avait pas d’homme qui fût moins que lui le collaborateur des jours de crise, celui avec qui l’on se sent en confiance et qui n’exécute pas seulement les ordres. Zur-

  1. À l’occasion du déplacement du colonel de Saxcé, le général Julliard avait fait lire aux troupes un ordre du jour où « il rendait hommage aux brillantes qualités qui lui avaient valu l’entière confiance de ses chefs ». Galliffet dut inviter Julliard à se montrer plus réservé. (11 juillet.)
  2. Le Journal officiel mentionne ainsi cette nomination : « 28e régiment de dragons, Lauth (Jules-Maximilien), chef d’escadron breveté ; 23 ans de service, 2 campagnes. » Galliffet fit observer que Lauth n’avait été l’objet d’aucune mesure disciplinaire et qu’aucune accusation précise n’avait été formulée contre lui.
  3. Voir p. 213, note 1.
  4. Voir p. 186.