Aller au contenu

Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/320

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
310
HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


d’assises. En effet, ils y ont été déférés seulement pour « provocation », en vertu de la loi sur la presse ; eux-mêmes, ils n’avaient pas cessé de réclamer d’être poursuivis devant la Haute Cour pour crimes de complot et d’attentat[1] ; surtout, la Chambre des mises en accusation, en déclarant dans son arrêt : « Ces crimes ne sont pas établis quant à présent[2] », a indiqué, réservé, qu’ils pourraient l’être par la suite. On ne peut donc opposer à de nouvelles poursuites contre Déroulède « ni l’application de la règle non bis in idem, ni le principe de l’autorité de la chose jugée[3] ».

Le complot et l’attentat « en vue de changer le gouvernement » sont prévus et punis par les articles 87 et 89 du Code pénal ; l’article 10 du Code d’instruction criminelle confère au préfet de police le droit certain de procéder aux arrestations et perquisitions nécessaires.

Armé du vote unanime du Conseil, Waldeck-Rousseau établit ensuite lui-même la liste des conspirateurs à mettre à l’ombre. Leur notoriété, l’éclat de leurs démonstrations publiques désignaient les principaux chefs : Buffet, Déroulède, Marcel Habert, Guérin, Godefroy, Lur-Saluces, Baillière, Barillier, Sabran, Moisson de Vaux, Dubuc ; pour les sous-ordres, Grimaud de

  1. Instr. Pasques, 94 et 110. (Voir p. 4 et 87.)
  2. Arrêt du 28 avril 1899.
  3. Haute Cour, V, 85, Octave Bernard. — Bérenger, dans son rapport, conteste, en ce qui concerne Déroulède et Habert, « qu’il y ait dans la qualification nouvelle : commis un attentat, des éléments non relevés lors de la première poursuite : provoqué directement à un attentat » (105). Il estime, en outre, par voie de conséquence, que « l’accusation d’attentat, légalement impossible à l’égard des inculpés précédemment traduits devant le jury, n’est point davantage admissible en ce qui touche les inculpés non compris dans les précédentes poursuites », Guérin, Baillière, Buffet, Godefroy, etc. (106). Par centre, il admet la poursuite, pour complot et actes préparatoires, à l’égard de tous les accusés (107 et 108).