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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/438

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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


et cela en pleine paix, sans le moindre prétexte de résistance, pour le seul plaisir de tuer et de faire souffrir. Les charniers qu’ils laissaient derrière eux, les camps aux palissades « ornées de têtes coupées », empestaient l’air[1]. Un seul de leurs officiers[2] ne voulut pas aller plus avant, revint à la côte où la rumeur de tant d’horreurs l’avait précédé. Voulet le dénonça pour « indiscipline et incapacité ». Les autres officiers alléguèrent plus tard qu’ils avaient craint, s’ils partaient, d’être l’objet de rapports diffamatoires[3].

Le gouvernement (c’était encore Dupuy), dès qu’il fut informé, ordonna à l’un des plus vieux officiers du Soudan, le lieutenant-colonel Klobb, qui se trouvait à Kayes, de courir après ces massacreurs, d’ouvrir une enquête sur place et, « si l’accusation était reconnue

    du lieutenant Pallier, des capitaines Joalland et Dubreuil, du commandant Crave ; lettre du lieutenant Peteau, etc. — Enquête du commandant Lamy et du capitaine Reibel sur la mission Voulet-Chanoine. — Charles Dorian, député de la Loire, qui accompagna Lamy au Soudan, résuma l’enquête dans un volume, encore inédit, Un député au Sahara. Un seul chapitre en a paru. (Gil Blas des 3, 4, 5, 6 et 7 mai 1904.) — Chambre des députés, 23 et 30 novembre 1900, discours de Vigne (d’Octon), Lasies, Guillain et Decrais. — Selon Lasies, Voulet avait été grisé par les louanges de Lebon, pour sa précédente mission, et par les pouvoirs exorbitants qui lui avaient été conférés par Trouillot, l’organisateur de la deuxième mission d’études. — L’instruction « pour établir les responsabilités dans l’affaire Voulet-Chanoine et leur donner les sanctions qu’elles appellent, et aussi dans l’intérêt de ceux qui, mêlés à cette malheureuse affaire, s’y sont conduits avec honneur », dura deux ans (1900-1902) et fut close par un non-lieu du Gouverneur général.

  1. Rapport du docteur Martinet (de Say, le 3 février 1899). — Dans un village aux environs de Say, on trouva 111 cadavres couchés côte à côte ; à Kondory, 1.000 prisonniers furent fusillés. (Rapport Pallier.)
  2. Le lieutenant Peteau.
  3. Télégramme Voulet et rapport Pallier.