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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/449

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RENNES


Esterhazy, comme ç’avait été le premier système du misérable ; en conséquence, ils laissèrent l’avantage aux experts de l’accusation qui repoussaient également la confession d’Esterhazy et la protestation de Dreyfus.

Teyssonnières ne va pas jusqu’à Bertillon ; cependant, « il y a un certain déguisement » dans l’écriture du bordereau[1] ; Couard donnerait toujours « sa tête à couper que le bordereau n’a pas été écrit par Esterhazy » et « qu’il y a eu calque, au moins pour quelques mots[2] » ; Varinard n’écarte pas moins vivement les aveux suspects qui sont venus de Londres : « Il est absolument impossible à la personne qui a fait l’écriture ronde du bordereau de faire l’écriture anguleuse d’Esterhazy…[3] » ; Belhomme, enfin, à l’abri de sa réputation de sottise, dit impunément ce que les autres se bornent à insinuer : « Depuis qu’Esterhazy, trahi par sa cousine, dénoncé par son cousin, poursuivi avec acharnement, a été poussé hors de France et jeté dans les bras de ceux qui l’attendaient là-bas et qui le sollicitaient en lui promettant la forte somme, il n’est plus libre d’agir, il est le prisonnier de ces gens-là, et il ne fera que ce qu’ils voudront. Il ne viendra pas s’ils ne lui en donnent pas la permission. Sa situation précaire est connue. Tant qu’Esterhazy n’aura pas fait sous nos yeux le bordereau qu’il prétend avoir fait, je ne croirai pas qu’il en est l’auteur[4]. » Et encore : « Esterhazy se dit l’auteur du bordereau : de quel bordereau[5] ? »

Ces experts, à la différence de Bertillon et de Valé-

  1. Rennes, II, 459, Teyssonnières.
  2. Ibid., 477 et 485, Couard.
  3. Ibid., 492, Varinard.
  4. Ibid., 575, Belhomme.
  5. Ibid., 568. — Belhomme rappelle, à cette occasion, les propos d’Esterhazy à un rédacteur de la Liberté sur les deux bordereaux. (Voir p. 271).