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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/560

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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


en cassation ; il dit qu’il prendrait lui-même l’initiative de la mesure au prochain Conseil, qu’il n’en laisserait l’honneur à personne et qu’il répondait de l’armée.

Les choses marchaient ainsi à souhait quand Millerand, avec son habitude des affaires de justice, découvrit tout à coup l’obstacle le plus inattendu.

On a vu que Mornard avait hésité à faire signer par Dreyfus son pourvoi devant le conseil de revision, qu’il n’en attendait rien et que Mathieu avait décidé de ne pas le soutenir. Or, le pourvoi ne pouvait point ne pas être admis, parce que les juges de Rennes, dans leur trouble, avaient négligé de se prononcer sur la surveillance de la haute police après l’expiration de la peine. La mention : « qu’il a été délibéré de la réduction ou de la dispense », étant prescrite par le Code à peine de nullité, le conseil de revision se trouvait tenu de casser le jugement de Rennes, sans que le commissaire du gouvernement pût s’y opposer. Mais la cassation ne sera que partielle, c’est-à-dire que le corps du jugement subsistera et que le nouveau conseil de guerre aura seulement à se prononcer, et sans débats, sur la question accessoire de la surveillance de la haute police[1]. Ainsi

  1. Code pénal, article 47 : « Si l’arrêt ou le jugement ne contient pas de dispense ou de réduction de la surveillance, mention sera faite, à peine de nullité, qu’il en a été délibéré… » Cour de cassation, arrêts des 4 avril 1874, 2 février 1875, 17 janvier 1878 : « La cassation de l’arrêt ne confère, en pareille circonstance, à la cour de renvoi que la mission de statuer sur la question de réduction ou de dispense de la surveillance et de faire mention, au cas où il n’y aurait ni réduction ni dispense, qu’il en a été délibéré. » — Pressensé, qui avait signalé le cas de nullité dans l’Aurore, avait cru d’abord « que tout était à recommencer… La nullité est radicale. » (11 et 12 septembre 1899.) Le 13, le rédacteur judiciaire du journal expliqua qu’il n’en était rien : « Les nouveaux juges, sans entendre de témoins et sur le simple réquisitoire d’un nouveau Carrière,