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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/123

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L’AMNISTIE


conflit qui a divisé si cruellement le parti républicain… » La Droite lui crie que c’est moi qui l’ai réveillé, qu’il est mon complice. Waldeck-Rousseau me désavoue, blâme « le discours de Digne », rappelle que, déjà, devant la Commission du Sénat, j’ai qualifié durement son projet d’amnistie : « Voilà pour notre accord ! » Ribot : « Et vous n’avez pas insisté ! » Et ce fut ensuite tout son discours.

À présent, Waldeck-Rousseau promet qu’il insistera, il repoussera tout ajournement, tout « armistice » : « Ce n’est pas une trêve passagère que le pays désire, c’est une paix définitive. » Comme il fait mine de prendre pour lui, pour sa politique, les quatre millions de suffrages républicains qui se sont prononcés aux élections municipales, Ribot le rappelle à plus de modestie : « La République, ce n’est pas vous. Monsieur le Président du Conseil ! »

On vote sur l’une de ces formules rebattues, qui promettent tout, qui n’ont cours que dans les Chambres de la troisième République[1] ; puis le véritable débat reprend, sur un amendement de Chapuis, député de Toul, l’un des républicains qui ont été le plus furieusement hostiles à la revision : « La Chambre invite le gouvernement à s’opposer énergiquement à la reprise de l’affaire Dreyfus, de quelque côté qu’elle vienne. »

Chapuis, sans crainte, va jusqu’au bout de sa pensée : « Je vous demande, s’il fallait choisir, entre la liberté d’écrire et la sécurité même du pays, de la France et de la République, si vous hésiteriez. »

Ainsi (ou les mots n’ont plus de sens), défense d’attribuer le bordereau à Esterhazy, d’appeler Henry

  1. « La Chambre, résolue à poursuivre énergiquement une politique de réformes républicaines et de défense de l’État laïque… »
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