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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/143

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L’AMNISTIE


là surtout pour gagner ses éperons devant l’Europe. Quelques-uns comprirent que le vingtième siècle allait compter une grande puissance de plus.

Vingt mille maires, adjoints ou délégués des municipalités se réunirent le 22 septembre, anniversaire de la proclamation de la première République, dans un grand banquet au jardin des Tuileries, sous la présidence de Loubet. La basse presse, le monde élégant s’acharnaient toujours contre lui ; il s’obstina à parler de réconciliation et de concorde : « Cette imposante assemblée est autre chose qu’un ralliement de combat. Cet anniversaire est la fête du patriotisme autant que la fête de la liberté. »

Le congrès socialiste international s’ouvrit le lendemain à Paris. L’objet principal de la réunion était « le cas de Millerand », la participation d’un socialiste au pouvoir « bourgeois ». La logique inflexible, la haine non moins intraitable de Guesde n’admettent pas d’exception au principe de la lutte des classes ; « un socialiste ne peut pas être à la fois un agent de conservation et de révolution sociale ». Jaurès, plus « opportuniste » que jamais, réfute Guesde, défend Millerand. Le délégué autrichien Kautsky trouva un compromis : le pouvoir gouvernemental, dans les pays où il est centralisé, ne peut être conquis fragmentairement ; cependant la participation d’un socialiste au gouvernement peut être considérée comme un expédient forcé, transitoire, exceptionnel ; « question non de principe, mais de tactique ».

Le congrès des socialistes français adopta une résolution analogue, rendit hommage à la bonne foi de tous, à leur seule préoccupation de servir le parti[1].

  1. Ordre du jour Turot.