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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/237

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LE BORDEREAU ANNOTÉ

Les groupes, s’étant réunis, décidèrent de ne point présenter d’ordre du jour collectif ; chacun gardera l’entière liberté de son vote. C’était la traduction, en langage parlementaire, de cette neutralité expectante, très humaine, qui paraît de loin beaucoup plus basse qu’elle ne l’était. Car Jaurès est certainement de bonne foi, mais il s’est déjà trompé ; les atmosphères brûlantes sont évocatrices de mirages, et quelle atmosphère a été plus brûlante que celle de l’Affaire !

VIII

Un vif combat précéda la bataille annoncée trop bruyamment et depuis trop longtemps ; les positions s’y déterminèrent (18 mars 1903).

La Chambre discutait sur la demande d’autorisation formée par les congrégations enseignantes d’hommes ; les socialistes chargèrent Pressensé d’expliquer leur vote. Ils ont mis en doute autrefois la réalité du péril clérical, invention bourgeoise pour éluder, ajourner l’étude des questions ouvrières, en détourner l’attention ; la lumière de l’Affaire a tout éclairé ; « ils ont trouvé le cléricalisme dans tout ce qui s’est fait non seulement contre la République, mais contre la justice et la liberté ». Et, comme la droite proteste « qu’elle n’a pas été contre la justice », Pressensé lui jette le nom du père Du Lac qui incarnait, dans l’imagination populaire, la Société de Jésus et tous les moines « ligueurs ».

Ce n’était pas la première fois qu’il était question devant la Chambre du père Du Lac dans ses rapports avec l’Affaire Dreyfus. On se souvient de mon entretien avec