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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/263

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L’ENQUÊTE


regarda encore et, bien que ce fût « d’un œil quelque peu distrait, » il remarqua cette fois « que le texte se trouvait coupé, de temps à autre, par les mots : École de guerre 1892-1894 ». Ces mots figuraient sur la première page de chacune des feuilles du cours autographié ; « le copiste les avait religieusement reproduits ». Ainsi « le cours était celui de 1892-1894 », et, comme Dreyfus, à cette date, n’était plus à l’École de guerre, il n’était pour rien dans la livraison du document qui avait été transcrit par le diplomate allemand.

Le lendemain, quand Targe lui apporta le texte du cours suivi par Dreyfus (1890-1892), André procéda lui-même à la comparaison avec la copie du comte d’Arco ; il y constata des différences notables qui ne laissaient place à aucun doute[1].

André fit alors appeler Gribelin[2], qu’il avait conservé au ministère, par quelque instinct qui se trouva sagace et « en dépit des criailleries de beaucoup de ses amis[3] », et lui demanda si le cours de l’École de guerre, quand il l’avait saisi chez Dreyfus, était ou non complet. L’archiviste n’eut pas une hésitation : « Je jure, dit-il, sur l’honneur que, dans les cours saisis chez Dreyfus et dont le récolement a été fait au cabinet du ministre par le colonel Du Paty, moi, Gribelin, Mme Dreyfus et sa mère[4], il ne manquait pas de feuilles[5]. »

  1. Cinq ans, 247 ; Cass., IV, 405, André.
  2. 29 juillet 1903.
  3. Cinq ans, 247. — Voir p. 52 la lettre de Picquart à Waldeck-Rousseau. Clemenceau (Bloc du 9 juin 1901) reprocha vivement à André d’avoir gardé Gribelin : « Quand il avait besoin d’un mensonge, Mercier criait : Allez me chercher Gribelin… Remarquablement dressé à la récitation mécanique de toute leçon apprise, etc… » (La Honte, 324.)
  4. Voir t. I, 130.
  5. Procès-verbal du 29 juillet 1903, signé : André, Gribe-