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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/266

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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


venue l’une des principales charges contre Dreyfus. Elle avait servi surtout à Rennes. Mercier, pour en marquer toute l’importance, déclara l’avoir mise au dossier secret en 1894, trois mois avant qu’elle eut été écrite[1] ; Gonse et Boisdeffre ne doutaient pas que les documents attendus par Panizzardi lui eussent été procurés par Dreyfus[2] ; de même Cuignet[3] ; et tout un lot d’officiers avaient attesté, à l’appui de l’accusation, la connaissance approfondie que Dreyfus possédait de l’organisation militaire des chemins de fer et l’intérêt suspect qu’il y portait[4].

L’une des vertus singulières du bureau des Renseignements, c’est qu’on n’y brûla, qu’on n’y détruisit jamais un bout de papier ; religieusement on y conservait tout, les brouillons, des copies en double et en triple exemplaires, jusqu’aux moindres rognures[5], Gribelin n’eut qu’à vider ses tiroirs.

La lettre de Panizzardi sur les chemins de fer n’avait pas séjourné longtemps chez Schwarzkoppen ; à peine lue et jetée par lui au panier, elle avait été ramassée par la Bastian, portée à Henry, remise à Sandherr qui en faisait aussitôt son rapport au ministre (Zurlinden) et à Boisdeffre. Ces rapports (ou bordereaux), signés de

  1. Rennes, I, 81, 99 et 98, Mercier. — Voir t. V, 329. — Mercier, à l’enquête de 1904, alléguera qu’il a été trompé par ses souvenirs. — Voir p. 314.
  2. Rennes, I, 528, Boisdeffre ; 545, Gonse.
  3. Cass., I, 359 et Rennes, I, 497, Cuignet.
  4. Rennes, I, 111 et 114, lettres du général Vanson et du capitaine de Pouydraguin à Mercier ; 290 et 318, Roget ; 509, Fabre ; 639, Junck ; II, 44, Bertin-Mourot ; 74, Boullenger ; 84, Maistre ; 92, Roy ; III, 585, Carrière (réquisitoire). — Mémoire Mornard, 230 et suiv.
  5. Les quelques pièces qui furent détruites le furent par ordre de Mercier ou par Mercier lui-même (le commentaire des pièces secrètes, le bordereau qu’en avait établi Gribelin). — Voir t. I, 451 et 603 ; III, 193 ; Revision du procès de Rennes, I, 414, etc.