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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/277

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L’ENQUÊTE


était connue de Picquart[1], il n’est point surprenant que les deux en-tête et les deux signatures de Panizzardi se superposent, ou à peu près. — « Les deux pièces portant d’assez nombreuses maculatures », André en déduit « qu’elles ont été décollées et recollées » ; et, en effet, ceux des fragments de papier où l’on retrouve l’écriture authentique de Panizzardi ont été décollés et recollés, mais par Henry lui-même, puisqu’il les a empruntés à deux lettres qui lui avaient été apportées en morceaux et qu’il avait fallu d’abord reconstituer ; et tant d’enquêtes, au surplus, où les deux faux étaient passés par tant de mains, les avaient nécessairement usés et souillés. — Enfin, l’échange entre les fragments, diversement quadrillés et teintés, des deux lettres qui ont servi à faire les deux faux (car non seulement les fragments qui portent l’écriture de Panizzardi leur ont été empruntés, mais encore les morceaux de papier où Lemercier-Picard a imité, d’un crayon exercé, le graphisme de l’Italien et qui sont les « blancs » de ces deux lettres, les parties qui ne portaient point trace d’écriture) ; cet échange, qu’Henry ni Lemercier n’auraient jamais pu faire, selon André, par inadvertance, Henry en a fait formellement l’aveu à Cavaignac[2].

  1. Rennes, I, 400, Picquart. — Voir t. II, 411.
  2. « Cavaignac : Allons, voyons, vous avez mis des morceaux de l’un dans l’autre ? — Henry (après un moment d’hésitation) Eh bien, oui ! Parce que les deux choses s’adaptaient parfaitement. J’ai été amené à ceci. J’ai reçu la première pièce au mois de juin 1894. Je l’ai reconstituée à ce moment-là, lorsque la pièce de 1896 est arrivée, il y avait quelques mots que je ne comprenais pas très bien ; j’ai pris quelques découpures dans la première pièce pour les mettre dans la seconde. » — Ce qui n’empêchera point Targe de déposer : « Henry a toujours refusé d’admettre la prétendue démonstration géométrique qu’on lui opposait et de reconnaître la possibilité d’un échange entre ces deux fragments des pièces 365 et 367. » (Cour de cassation, 13 juin 1904.).