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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/419

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LA REVISION


d’autres camarades. Ils avaient donné seulement à leurs loges, et sans passer par aucun intermédiaire, des renseignements sur les officiers qu’ils connaissaient personnellement et qui demandaient à entrer dans la maçonnerie[1] ». L’explication, pour deux d’entre eux au moins, Pasquier, commandant des prisons militaires de Paris, et le commandant Bouqueiro, était matériellement inexacte[2]. André l’accepta pourtant : c’étaient d’excellents soldats, de vieux républicains, qui n’avaient reçu aucune faveur ; « il n’y avait à prendre contre eux aucune mesure ».

Maintenant tous les jours, les journaux de l’opposition[3] publiaient des « fiches », en remplirent leurs colonnes pendant deux mois, jusqu’à la fin de décembre, tant Bidegain en avait volé. Et c’était toujours la même accusation monotone, vraisemblablement exacte pour beaucoup d’officiers, qu’ils n’étaient point républicains, qu’ils professaient des opinions cléricales, qu’ils allaient à l’église, qu’ils n’avaient point cru à l’innocence de Dreyfus ; parfois des indications grossières sur la vie privée ; et il n’était que trop vrai qu’André s’était renseigné là, car Bidegain avait encore livré à

  1. Chambre des députés, séance du 4 novembre 1904, discours d’André.
  2. La plupart des officiers, plus de cent, qui avaient été l’objet de renseignements donnés par Pasquier à Vadecard, n’avaient point demandé à entrer dans la maçonnerie, ainsi que cela résulte de la publication des fiches. Bouqueiro avait rédigé notamment deux fiches sur le général Silvestre, « actuellement chef de la mission française en Mandchourie, venant de l’Élysée, sournois, hypocrite, capable de toute trahison, qui devrait être exclu de la garnison de Paris ; démissionnerait alors et débarrasserait l’armée », et sur le général Lachouque, « craintif, désireux de ménager tous les partis, ayant évidemment ses sympathies du côté clérical »
  3. Figaro, Gaulois, Écho de Paris.