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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/520

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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS

Je tiens d’une autre source, non moins sûre, ce que j’ai raconté de la première visite, en 1893, d’Esterhazy au colonel de Schwarzkoppen.

Vous savez, Monsieur, que M. de Munster, dans les déclarations répétées qu’il a faites à M. Hanotaux, qui en est convenu devant la Cour de cassation ainsi qu’à M. Casimir-Perier et à M. Charles Dupuy, s’était borné à attester, « sur l’honneur, que l’Allemagne n’avait jamais eu, ni directement, ni indirectement, aucune relation avec Dreyfus ». De même, M. le comte de Bulow, ministre des Affaires étrangères, dans son discours du 24 janvier 1898, au Reichstag : « Je me bornerai donc à déclarer de la façon la plus formelle et la plus catégorique qu’entre l’ex-capitaine Dreyfus, actuellement détenu à l’île du Diable, et n’importe quels agents allemands, il n’a jamais existé de relations ni de liaisons de quelque nature que ce soit. » Toutefois, ni M. le comte de Bulow, ni M. le prince de Munster ne s’étaient cru le droit de convenir officiellement des relations de Schwarzkoppen avec Esterhazy.

Cette confession complète qu’il répugnait à M. le comte de Bulow de porter lui-même devant le Reichstag allemand ou de faire porter par son ambassadeur au gouvernement français, vous la trouvez dans la lettre que j’ai reçue, en 1901, de M. le prince de Munster. Pour vous emprunter vos propres expressions, « les données précises », les voilà.

J’eusse préféré, — je l’ai dit dans vingt articles, — que les ténèbres de ce drame douloureux fussent dissipées par une lumière purement française ; j’avais hésité jusqu’à présent à faire usage de cette lettre où M. le prince de Munster avoue, en termes si formels, la trahison d’Esterhazy. Vous m’y décidez par votre appel à M. Jaurès : « Dites-moi si une âme française et patriote… »

Vous avez assis votre conviction sur le racontar que M. le colonel Stoffel a faussement attribué à M. le prince de Munster. Je vous réponds par une lettre autographe