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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/91

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L’AMNISTIE

La discussion du budget occupa presque toute la session. Waldeck-Rousseau, satisfait de l’ajournement de nos procès, laissait, depuis quatre mois, sommeiller l’amnistie ; volontiers, il l’aurait laissée dormir plus longtemps. La commission sénatoriale la réveilla par un scrupule de légalité. Le règlement n’accorde pas aux ministres le droit d’amender les propositions qui émanent de l’initiative parlementaire ; Waldeck-Rousseau et Monis ayant commis cette erreur[1], le Sénat n’était pas régulièrement saisi.

Le principe d’une loi d’oubli accepté, trois objections ont été faites aux propositions primitives du gouvernement : on n’amnistie que des condamnés ; ni Picquart ni moi nous ne le sommes, et l’opposition de Zola a fait tomber le jugement rendu par défaut à Versailles ; — il faut excepter le meurtre (l’attentat contre Labori) de l’amnistie ; — la survivance de l’action civile est de droit étroit. Waldeck-Rousseau renonça donc à demander expressément l’amnistie pour les faits connexes à l’Affaire et déposa un projet « sur l’extinction de certaines actions pénales[2] ». C’étaient « toutes les actions publiques à raison de faits se rattachant à l’affaire Dreyfus et toutes poursuites commencées ou non », à la seule exception de celles qui étaient engagées ou pourraient l’être pour crime de meurtre ou d’assassinat ; les actions civiles étaient, cette fois, réservées.

Le nouveau projet sauvegardait mieux les apparences que le précédent ; en fait, il aboutissait, sauf pour moi, aux mêmes conséquences. Mercier, les faussaires du deuxième bureau et les faux témoins de Rennes échap-

  1. Voir p. 50.
  2. 1er mars 1900.
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