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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS

sujet des finances, et M. de Guibert, qui aime le son de sa propre voix, parle longuement pour prouver qu’il ne s’y entend que peu. C’est cependant un ardent Neckeriste. Je quitte avant minuit, me sentant un peu indisposé. La journée a été belle, mais en cette grande fête de Noël, Paris montre combien il a perdu par la révolution. Le papier de la caisse continue à baisser, et la perte est actuellement de deux pour cent. Les actions tombent aussi rapidement, ce qui est naturel.


26 décembre. — Un membre du comité des finances déclare aujourd’hui au club que le total de la dette publique est d’environ 4,700,000,000 de francs, y compris le remboursement des charges de toutes sortes, et en calculant les rentes viagères au denier dix, elle peut monter peut-être à 4,800,000,000 de francs, soit 200,000,000 de livres sterling. C’est donc là le maximum du fardeau qui écrase ce royaume. L’abbé d’Espagnac prétend que la somme est beaucoup moins élevée. Au plus fort de la dispute, arrive un monsieur nous donnant la nouvelle extraordinaire que Monsieur, le frère du roi, s’est rendu à la Commune et y a prononcé un discours au sujet de l’accusation qui circulait contre lui, hier, d’être à la tête du complot supposé contre M. Bailly et M. de La Fayette. Je vais chez Mme de Chastellux. Le chevalier de Graave nous y apporte le discours de Monsieur. Il est très bien écrit, mais l’orateur commet la faute de se traiter lui-même de citoyen et ses auditeurs de concitoyens. Je vais au Louvre et Mme de Flahaut me raconte l’histoire de ce discours. Hier, Monsieur, apprenant cette calomnie, s’adressa au duc de Lévis, qui, ne sachant pas quel conseil lui donner, l’envoya à l’évêque d’Autun ; celui-ci composa le discours. Ce matin Monsieur s’adressa au roi et lui demanda si son intention était de chasser du royaume un autre de ses frères, et finit par se plaindre de la calomnie. Ceci est une allusion à La Fayette qui a trop