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Page:Journal de Gouverneur Morris.djvu/308

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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS.

promet de sonder le roi et la reine, et je promets de lui fournir quelques indications.


7 décembre. — Aujourd’hui, au cours de ma conversation avec M. de Laborde, nous parlons de choses et d’autres, jusqu’à ce qu’enfin il me communique un journal qu’il écrit, et qui est distribué aux frais du roi aux loges maçonniques du royaume. Il dit que le roi, la reine, M. de La Porte et lui, sont les seules personnes dans le secret. Je lui expose que par ce même moyen il peut tâter le pouls de la nation, et déterminer en conséquence ce que l’on peut essayer avec chance de succès. Il me demande de lui donner une liste des questions que je propose ; je promets de l’envoyer. Je le laisse à ses regrets de la confidence qu’il vient de me faire ; telle est la nature humaine. M. de Narbonne est allé ce matin annoncer sa nomination à l’Assemblée. Je serais étonné qu’il réussît, car, bien qu’il ne manque nullement d’intelligence, je crois qu’il n’a pas l’instruction nécessaire, qu’il n’a pas acquis l’habitude des affaires, et qu’il est totalement dépourvu de méthode. Nous verrons.


8 décembre. — Je continue à préparer le plan d’une Constitution pour le pays, lorsque arrive quelqu’un qui me dit qu’en juillet dernier il a envoyé au général Washington le plan d’une Constitution pour l’Amérique. Il assure qu’il étudie ces choses depuis plus de cinquante ans, qu’il connaît parfaitement l’Amérique, bien que ne l’ayant jamais vue, et il est convaincu que la Constitution américaine n’est bonne à rien. Je me débarrasse de lui le plus tôt possible, non sans être frappé de la ressemblance entre un Français qui fait des constitutions pour l’Amérique, et un Américain qui rend le même service à la France. Mon amour-propre me dit qu’il y a une grande différence entre les personnes et les circonstances, mais l’amour-propre