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Page:Journal de Gouverneur Morris.djvu/373

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APPENDICE.

cela. Vous vous rappelez sans doute que l’Assemblée qui touche à sa fin avait été convoquée pour arranger les finances, et vous apprendrez peut-être avec surprise qu’après avoir dépensé une somme de cent millions sterling provenant des biens d’Église, elle laisse ce département dans une situation pire qu’elle ne l’avait trouvé, et, à mon avis, toutes les chances sont plutôt pour que contre la banqueroute. Les aristocrates, qui sont partis et partent encore en grand nombre pour rejoindre les princes émigrés, croient sincèrement à une coalition des puissances européennes pour rendre à leur souverain son ancienne autorité, mais mon avis est qu’ils se trompent beaucoup. Rien d’important ne peut être tenté cette année, et bien des faits peuvent se produire avant le mois de juin prochain, même si les divers souverains y songeaient sérieusement. Je suis porté à croire que leurs vues différent beaucoup de celles qu’on leur prête, et il n’est pas du tout improbable que cette tentative, si l’on en fait une, se bornera, en ce qui concerne la France, à un démembrement. Le point faible du royaume actuellement, c’est la Flandre, mais si les provinces d’Alsace et de Lorraine, la Flandre française et l’Artois étaient enlevés au pays, la capitale serait constamment exposée à la visite d’un ennemi. Ces provinces, vous le savez, ont été acquises au prix de beaucoup de sang et d’argent, et si Louis XIV avait réussi à faire du Rhin sa frontière depuis la Suisse jusqu’à l’Océan, il aurait presque obtenu les avantages d’une position insulaire. Il est bien difficile de ne pas souhaiter voir les pays compris dans ces limites, unis sous un gouvernement libre et effectif, car ce serait le moyen de répandre en peu de temps les bienfaits de la paix sur toute l’Europe. Mais à ce sujet un être raisonnable n’a maintenant que le droit de faire des souhaits et non de nourrir des espérances. Ci-joint une note, reçue à l’instant, avec les dernières nouvelles de Coblentz ; elle est écrite par le prince de Condé à son confident à Paris, et elle est accompagnée de la demande que tous les gentilshommes français capables de service actif rejoignent immédiatement l’étendard de la royauté — au delà du Rhin ou plutôt sur les rives de ce