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Page:Jouvet - Réflexions du comédien, 1938.djvu/46

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matique que décernait le peuple d’Athènes. Quand Shakespeare transformait l’histoire ou la légende en chefs-d’œuvre, c’était pour plaire au public du théâtre du Globe, et Corneille, Racine et Molière ont cherché à plaire, tout comme Sacha Guitry cherche à plaire.

C’est de ce point de vue que l’on peut découvrir tout le panorama dramatique, que l’on peut tout juger et tout comprendre, dans notre profession. C’est de ce point de vue que l’on peut, en discriminant les moyens employés dans l’art de plaire, classer les œuvres, apprécier les hommes qui les ont écrites et juger aussi le public à qui elles s’adressaient. L’histoire de l’art dramatique, écrite en tant que traité pratique et théorique de l’art de plaire, ou des différentes manières de plaire, offrirait une abondance de commentaires féconds où notre connaissance du théâtre trouverait, en même temps que le sens de la tradition, les exemples les plus démonstratifs des lois de l’art dramatique.

Une pièce, ce jeu d’un soir, est une conversation entre l’auteur et le public, une sorte de proposition spirituelle offerte et reçue ou refusée. C’est sur cette convention partagée ou rejetée qu’il importe d’abord de s’entendre et de faire un choix, pour l’auteur qui écrit la pièce, pour les acteurs qui la jouent et pour le public qui va l’entendre.

Mais, dans cet art, c’est l’auteur qui est le point de départ et le premier responsable, c’est lui qui est au sommet de cette trinité, c’est le créateur. Seul, il a droit à ce titre, car tout dérive de lui et le problème du succès,