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Page:Jouvet - Réflexions du comédien, 1938.djvu/47

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l’art théâtral, aboutit en définitives ascensions et se situe enfin sur le plan de la production, c’est-à-dire des œuvres, des écrivains.

Si j’écris jamais un traité sur l’art dramatique, je me bornerai à faire parler tous ceux qui, dans un théâtre, concourent à la recherche et à l’exécution des jeux qui s’y ordonnent.

Je suis sûr que leurs propos viendront à l’appui de mes affirmations.

Le comédien, mandataire et témoignage vivant de l’auteur, qui traduit les sentiments du poète dramatique, en sait plus long, à vivre sur une scène, que beaucoup de ceux qui méditent ou qui parlent du théâtre. Renoir, à qui je proposais, un jour, la lecture d’une longue et savante étude critique sur un rôle classique important qu’il va interpréter — après avoir balancé un moment, aux éloges que je faisais sur cette étude — me répondit, avec sa simplicité habituelle : « Non, cela ne m’intéresse pas. » Et comme j’insistais, étonné de son refus, il me dit tout à coup, après un nouveau silence :

— Non, je t’assure, mon vieux, ça ne m’intéresse pas. Ces gens-là, vois-tu, ne sont pas au départ, ils sont à l’arrivée.

Et c’est là la différence des points de vue, c’est qu’il faut être au départ, et courir la course, et mener le jeu pour savoir ce qu’est notre métier. Les autres, le public, comme la critique, ne sont qu’à l’arrivée.

Il n’y aurait qu’à recueillir les propos entendus du-