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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/122

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VISIONS DE L’INDE

gîte dans les yeux de ces brutes magnifiques. Quel Indien, même le plus matériel, n’aurait pas ces beaux yeux où l’âme monte, victorieuse des instincts, sachant le néant des gloires ? Je souris au portrait du précédent maharajah à cheval avec un pantalon vert et une houppelande de hussard, jouant les maréchaux de notre Empire.

Un grand calme règne. Là-bas, une claire issue. S’ouvre la terrasse aux arcades dentelées qui encadrent le ciel. Un des officiers du palais, pieds nus par respect, me suit. Que se passe-t-il dans cette cervelle falote ? Il dédaigne de m’exhiber les merveilles uniques d’un art à jamais perdu ; mais il m’entraîne devant des oiseaux mécaniques qui, remontés par une clef, volent, battent des ailes, chantent. Plus loin, il me fait arrêter près de fleurs de nacre sur lesquelles errent des insectes artificiels. Mais, où il triomphe, c’est à une femme, la gorge quasi nue, en chemisette et en corset, une blanche, je vous prie, une Parisienne, qui, devant sa psyché, se poudre, tourne et sourit. Cette poupée de coiffeur, ce mannequin de mode, ce déshabillé grivois apparaissent au natif le comble de la beauté et du progrès. Il cherche dans mes yeux la stupéfaction admirative. Je me détourne, je vais m’accouder à la terrasse célèbre pour l’incomparable vue qu’on y découvre.