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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/125

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VISIONS DE L’INDE

abandonné, d’où s’élancent en frise, les anges hindous, les apsaras, génies féminins et ailés jouant de la lyre. Je reprends la barque royale aux chevaux bondissants. Je suis loin des abominables ghâts ; je ne respire plus la senteur de ces déjections millénaires qui propagent la peste et le typhus. Près de Ramnagar, que le Gange est pur ! Ici, tout souci est indigne ; la nature émane une douceur qui panse toutes les plaies. Le vieux fort fuit derrière moi, immense, plein d’amour ancien, de gloire défunte, de prières dissipées. L’eau n’est maculée que par le sable… Bénarès, au loin, apparaît une cité paisible au milieu des vergers… Plus de commerce, d’industrie, d’usines, comme à Calcutta ; plus de dieux sanglants, plus de temples horribles, plus de mendiants âpres et paresseux, réclamant le sordide bakchich. Je remercie le petit rajah souriant, efféminé et bon qui m’a permis de goûter ce soir sans tache, qui m’a fait revivre l’Inde morte, l’Inde de notre rêve et de notre cœur, le pays idéal, où la volupté est pure et le mystère transparent.


… Devant le rideau de ma porte, le policier hindou m’attend, allègre.

« Le picturesman, dit-il, est un honnête homme. Quant au « flatman », à l’homme gras,