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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/147

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VISIONS DE L’INDE


IV

La Courtisane indignée.

L’après-midi, mon ami m’entraîne aux bazars. C’est le lieu qu’il préfère en toutes les villes hindoues. Je me laisse faire, car j’aime aussi cette poussière chargée de vie, cette odeur d’épices, de tabac mêlé à de la confiture et à l’eau de rose, ce bariolage de couleurs, ce soleil qui allume des gestes et des étoffes, cette vie native si différente de la nôtre, et qui nous ramène en arrière dans le passé, à plusieurs mille ans. À Lucknow, une rue spéciale est réservée aux marchands ; une barre de bois la ferme aux voitures. J’y sens une hostilité contre l’Européen. Je n’y retrouve plus la servilité détrousseuse de Bénarès, mais une sorte d’aversion, la volonté de ne pas accepter le blanc, de l’écarter de soi et même de son travail. Les indigènes, qui se sont improvisés nos guides, ont eux-mêmes moins de tendance au lucre et une certaine arrogance. Des vendeurs ne se dérangent même pas quand je leur demande de voir ce qu’ils vendent.

Un coin amuseur, c’est le coin des joailliers. Dans leurs cases, accroupis sur les talons comme des

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