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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/148

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VISIONS DE L’INDE

singes ou les jambes croisées, des vieillards studieux avec des pinces sertissent des pierres non dépolies dans des anneaux d’argent tordus sous leurs doigts. Quelle évocation préhistorique de bracelets pour jambes et bras, de bagues servant aux pieds et aux mains ! Le globe-trotter lui-même ne peut distinguer parmi des cabochons misérables, les pierres vraiment précieuses qui y sont noyées. Le zèle de nos guides s’évertue à désigner l’objet d’argent ou d’or. L’or, l’argent, pour eux tout est là.

Des femmes très belles s’appuient à des terrasses de bois dominant les bazars. Elles se préoccupent peu de nous, n’ont rien de l’air résigné et propice des courtisanes entr’aperçues à Bénarès, dans le marché aux étoffes. Elles sont l’âme voluptueuse de la fière Lucknow, la Guerrière, la Révoltée. Cependant, j’imagine qu’elles doivent servir au plaisir. Elles sont vêtues de tuniques jaunes, dont elles ramènent les manches sur leurs bras nus, quand nous les regardons ; mais elles ne cachent pas leur figure, et se contentent de détourner leurs regards. Elles ont d’abondants pendants d’oreilles et de nez, leur teint est clair, leurs traits nobles. La nonchalance d’une distinction séculaire les alanguit. Elles n’ont qu’un geste trivial, celui du houka, qu’elles fument comme les hommes, leurs fines bouches à même la noire noix de coco.