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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/415

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VISIONS DE L’INDE

d’une âme pareille ! Les plus belles choses elles-mêmes sont flétries, quand on les voit de ses seuls yeux, quand nul ami, nulle amie ne peuvent partager vos impressions.

Ces visages sombres, quémandeurs, défiants, douloureux, mais qui ne sympathisent jamais, finissent, se dressant inlassablement autour de vous, par devenir angoissants et funestes. On sent très bien qu’ils ne sauraient nous aimer, ces beaux yeux languissants et amers ; d’abord parce que les races différentes sont plus encore séparées par le sang que par les océans et les abîmes, ensuite parce que nous, les visages clairs, même n’étant pas anglais, nous apparaissons les conquérants, les usurpateurs, tandis qu’eux restent les craintifs et les opprimés…

Une pensée domine ces êtres : abuser de leur faiblesse afin de nous tirer par supplication, par ruse, le plus d’argent possible. Race amollie, qu’il faut plaindre ; car la perfidie et la vénalité sont les premiers signes de la faiblesse. Je n’ai pas senti mon cœur se serrer davantage devant l’horrible spectacle des affamés ou les hideurs de la peste ; et j’ai peut-être regretté le vice des âmes plus que la souffrance des corps ! Peuple lamentable qui a perdu sa générosité antique et sa grandeur et qui, peureux des coups et pliant le dos devant la me-