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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/144

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les sacrements à l’abbé Lemaire dans les vingt-quatre heures.

Par malheur, il y avait fête de la Vierge le lendemain, puis un dimanche ; le parlement ne s’assembla que trois jours après l’arrêt. L’abbé Lemaire était toujours sans sacrements dans son lit. Comme on allait délibérer, survient un ordre du roi de surseoir, et d’envoyer des députés à Versailles. Le premier président se rend auprès du roi, avec deux présidents à mortier, et lui adresse, dit Barbier, un discours très-touchant ; mais le roi répond durement, qu’il a cassé l’arrêt du parlement, et qu’il évoque à sa personne la connaissance de l’affaire. Le parlement ne se tient pas pour battu. Il ordonne aux gens du roi de prendre des conclusions. Les gens du roi demandent du temps pour délibérer, et ne peuvent se mettre d’accord entre eux, tant l’affaire est embarrassante. Ils se rendent à leur tour à Versailles, où le roi veut bien leur dire qu’il avisera promptement, vu l’état pressant du malade. Les gens du roi rapportent cette réponse le mardi à onze heures. On délibère. Vers deux heures, arrêt qui ordonne aux gens du roi de s’informer de l’état du malade, et d’en rendre compte à six heures du soir ; et sur cet arrêt on se sépare pour aller dîner.

Mais quand on se réunit le soir pour entendre le rapport des gens du roi, l’avocat général d’Ormesson déclara que le malade était mort. On envoya un huissier pour saisir le frère Bouëttin, qui ne se trouva pas au presbytère, et la chambre se sépara enfin à quatre heures du matin, en remettant l’affaire à quinzaine, à cause des vacances de Pâques. Le convoi de l’abbé Lemaire fut suivi par dix mille personnes. L’intervalle des vacances fut rempli de pourparlers entre le roi, les ministres, et les chefs du parlement. Le roi finit par donner défenses expresses de suivre la procédure contre le curé de Saint-Étienne. On fît, sans succès, plusieurs remontrances. Le roi destitua le frère Bouëttin, et quelques autres curés ; et le parlement,