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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/152

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« Notre justice et l’intérêt de notre royaume ne nous permettent pas d’exclure plus longtemps des droits de l’état civil ceux de nos sujets ou des étrangers domiciliés dans notre empire qui ne professent point la religion catholique. Une assez longue expérience a démontré que ces épreuves rigoureuses étaient insuffisantes pour les convertir. Nous ne devons donc plus souffrir que nos lois les punissent inutilement du malheur de leur naissance, en les privant des droits que la nature ne cesse de réclamer en leur faveur. » Malgré ces dernières paroles, où le droit absolu de la liberté de conscience est invoqué, le roi semble se déterminer surtout par la considération de l’insuffisance et de l’inutilité des épreuves rigoureuses[1]. Un reste de

  1. Le 23 août 1789, Rabaud Saint Etienne disait à l’Assemblée constituante : « Dans le dernier édit pour les non-catholiques, on ne leur a accordé que ce qu’on ne pouvait leur refuser, je veux dire le droit de constater seulement leur contrat de mariage, etc. ; mais du reste, ils sont exclus de tous les emplois et des honneurs. Le militaire ne peut obtenir la croix de Saint-Louis. On peut dire avec raison que la pairie est une marâtre pour les protestants ; ils font tout pour elle, et la patrie ne fait rien pour eux. » — Voici, du reste, les propres paroles du garde des sceaux Lamoignon, dans le lit de justice du 19 novembre 1787 ; « Le roi a concilié dans la nouvelle loi les droits de la nature avec les intérêts de son autorité et de la tranquillité publique.
     « S. M. ne veut point d’autre culte public dans son royaume que celui de la religion catholique, apostolique et romaine. Cette religion sainte, dans laquelle le roi est né, sous laquelle le rojaume a été florissant, sera toujours la seule religion publique et autorisée dans ses États.
     « S. M. prescrit les formes légales qui doivent constater la naissance, les mariages et la mort de ses sujets non catholiques ; et elle borne sa juslice à leur égard à ces facultés primitives, qui sont un droit sacré de la nature plulôt qu’un bienfait arbitraire de la loi.
     « Toue la partie éclairée de la nation sollicitait depuis longtemps cette loi, que S. M. n’a souscrite qu’après les plus mûres délibérations.
     « Aux grands avantages qui doivent en résulter pour la population, pour l’agriculture, pour le commerce et pour les arts, se joindra encore celui de ne plus voir de contradiction entre les lois et la nature, entre les lois et les jugements des tribunaux ; enfin, entre les suppositions des ordonnances et l’évidence invincible des faits.
     « Les sujets non catholiques du roi seront protégés par des lois qui assureront leur état, sans les rendre dangereux ; et la sage tolérance de leur religion, ainsi restreinte aux droits les plus incontestables de la na-