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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/194

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Le pape n’attaquait pas seulement le décret relatif à la religion catholique. Dans une bulle du 10 mars 1790, il condamnait en termes indignés « cette liberté de penser, de dire, d’écrire, et même de faire imprimer impunément, en matière de religion, tout ce que peut suggérer l’imagination la plus déréglée : droit monstrueux, qui paraît cependant à l’Assemblée résulter de l’égalité et de la liberté naturelles à tous les hommes. » Enfin, dans un bref du 13 avril 1791, il condamna définitivement, comme contraire à l’orthodoxie, la Constitution civile du clergé. Dès ce moment, il y eut trois partis en France, en matière de religion : ceux qui ne voulaient plus de religion, ceux qui obéissaient à la loi de l’État en acceptant la Constitution civile du clergé, et ceux qui obéissaient au pape en la rejetant. Ces deux derniers partis, l’un schismatique, l’autre rebelle, se prétendaient l’un et l’autre catholiques. Ils étaient l’un et l’autre partisans du lien indissoluble entre la religion et l’État, les premiers en subordonnant la religion, les autres en subordonnant l’État. Ils pouvaient, de part et d’autre, tolérer des cultes dissidents, mais puisqu’ils demandaient une Église officielle, ils étaient ennemis de la liberté. La liberté de conscience n’avait donc pas de partisans dans cette Assemblée vraiment libérale, et qui mettait la liberté de conscience au nombre des premiers principes du droit public.

Parmi les évêques, quatre seulement acceptèrent la Constitution et conservèrent leurs sièges[1]. L’un d’eux, qui était cardinal, offrit sa démission de cardinal au pape, qui l’accepta. Les autres évêques émigrèrent pour la plupart. Ceux qui restèrent ne tardèrent pas à être persécutés. On peut dire que l’Assemblée constituante et surtout les assemblées qui suivirent, persécutèrent les insermentés par les voies ordinaires de la persécution, la confiscation,

  1. Loménie de Brienne, cardinal, ancien ministre, archevêque de Sens, Talleyrand Périgord, évêque d’Autun, de Jarente, évêque d’Orléans, de Savines, évêque de Viviers.