Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/216

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passa dans le sein de l’Assemblée une scène révoltante. Elle avait entendu, le 28 août, des enfants, conduits par leurs instituteurs, venir demander qu’on ne leur enseignât plus la morale au nom du soi-disant Dieu ; elle avait vu un évêque (l’évêque de Périgueux) lui présenter son épouse. Elle avait laissé défiler devant elle des députations d’hommes affublés d’insignes sacerdotaux, et portant comme en triomphe les richesses dérobées aux églises. Mais la journée du 7 novembre effaça toutes les autres. On venait de lire à la tribune la lettre d’un curé, nommé Parens, qui voulait abjurer, mais à condition qu’on lui fît une pension. « Je suis prêtre et curé, disait-il, c’est-à-dire charlatan. Jusqu’ici charlatan de bonne foi, je n’ai trompé que parce que moi-même j’avais été trompé. Maintenant que je suis désabusé, je vous avoue que je ne voudrais pas être charlatan de mauvaise foi. Cependant la misère pourrait m’y contraindre. Il me semble qu’il serait bon d’assurer le nécessaire à ceux qui veulent rendre justice à la vérité. Mes paroissiens veulent que je leur parle de neuvaines, de sacrements, de cent mille dieux. Ce n’est pas plus mon goût que le vôtre. » Pendant qu’on applaudissait, et que d’indignes prêtres, reniant leur passé et leur foi, déposaient leurs lettres de prêtrises sur la tribune[1], on vit entrer au sein de la Convention Gobel, évêque constitutionnel de Paris, et précédemment évêque de Lydda, et membre de l’Assemblée constituante, accompagné de ses grands vicaires et de plusieurs prêtres de son clergé[2]. Ils étaient conduits par des membres de la commune, chargés de les escorter, moins pour leur faire honneur, que pour les maintenir dans leurs résolutions. Momoro, qui les présenta à la Convention, déclara qu’ils deman-

  1. Même séance. Discours de Bernard. « Je rends justice aux vérités que vient de développer sur le compte des prêtres Léonard Bourdon. Je proteste que cette tache originelle, dont j’ai été souillé malgré moi, cesse de me déshonorer depuis quatre ans… »
  2. Gobel fut condamné et exécuté le 24 germinal an II.