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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/268

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nonces accrédités à l’étranger, aux nombreux prélats qui sont nécessaires à l’expédition des affaires ecclésiastiques, nous mettent dans la plus grande pénurie… » Ni cette lettre, ni les instances de Caprara ne purent rien obtenir. Le pape et le légat furent payés en belles paroles. « Le pape doit avoir confiance en moi, » disait Bonaparte. Il fut plus franc dans la question des biens du clergé français, qui, en effet, ne pouvaient être rendus. Il ne fit jamais de promesses, et s’en tint strictement à l’article 13 du concordat.

Le bon accord n’en subsista pas moins pendant quelque temps entre la cour de Rome et celle des Tuileries. Bonaparte offrait de l’argent, il faisait évacuer Ancône et Otrante, il obligeait le roi de Naples à restituer Ponte-Corvo et Bénévent, il envoyait en présent au Saint-Père deux beaux bricks complètement armés. Le pape, de son côté, nommait cinq cardinaux français[1], protégeait à Rome la famille du premier consul, consentait à venir sacrer le nouvel empereur[2], et recevait à Notre-Dame son serment de maintenir le Concordat[3]. Tout changea

  1. MM. de Belloy, archevêque de Paris, Fesch, archevêque de Lyon, oncle du premier consul, Cambacérès, archevêque de Rouen, frère du second consul, Boisgelin, archevêque de Tours, de Bayonne, doyen du tribunal de Rote. L’abbé Fesch ne comptait pas parmi les prêtres constitutionnels. En effet, il avait jeté le froc aux orties sous la Révolution, s’était fait fournisseur d’armée, et avait tenu dans cette position une conduite fort peu édiflante. Il rentra dans l’Église quand il vit l’élévation et les projets de son neveu, fit pénitence dans un séminaire, et en sortit pour être archevêque, cardinal et ambassadeur à Rome.
  2. « Le seul bruit vague de la possibilité du voyage du pape a provoqué un déluge de critiques, à commencer par les ministres étrangers qui donnent au Saint-Père le titre de Chapelain de l’Empereur. » Le cardinal Consalvi au cardinal Caprara, dépêche chiffrée du 5 juin 1804. Sur tout ce qui a précédé et suivi le sacre de Napoléon Ier, voyez M. d’Hausson-Ville, Revue des Deux-Mondes du 1er janvier 1807, p. 32 sqq.
  3. L’empereur jura de maintenir la liberté des cultes et les lois du concordat. Ce serment ne satisfaisait nullement la cour de Rome. « Respecter et faire respecter les lois du Concordat, disait le cardinal Consalvi (lettre chiffrée au cardinal Caprara, du 5 juin 1804), n’est autre chose