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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/293

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semble équitable. Les cultes, une fois reconnus, sont traités chez nous avec une égalité complète. Si l’on sent quelquefois l’action dominante du clergé catholique, cela ne tient ni aux lois, ni aux institutions, mais à ce fait très-considérable que l’immense majorité du pays appartient à cette religion. Tous les cultes reconnus ont des temples, des pasteurs rétribués, une entière liberté pour la célébration des offices et la prédication, pour l’enseignement religieux à tous les degrés, pour l’accomplissement des fonctions sacerdotales et pour le recrutement du clergé. La loi civile, qui ne fait en aucun cas acception des personnes, est égale pour le chrétien, pour le juif, pour le musulman. Non seulement la Constitution ne fait aucune différence entre les citoyens pour l’admissibilité aux emplois ; mais dans la pratique, l’impartialité des gouvernements qui se sont succédé, surtout depuis 1830, est incontestable. On a prévenu, par des mesures à la fois prudentes et libérales, les conflits entre les fidèles de différents cultes, entre les magistrats civils et les ministres du culte. C’était là la place, c’était l’emploi des lois de police ; et elles ont été faites avec habileté. Notre législation est donc excellente une fois qu’on a admis les deux grosses iniquités du Concordat et de l’autorisation préalable. Sur un point seulement, je ferai une observation, pour l’honneur des principes.

Tout le monde sait que les cardinaux sont de plein droit membres du Sénat. Je ne cherche pas si, outre les cardinaux, le Sénat compte des évêques parmi ses membres, quoiqu’on puisse se demander s’ils ont été nommés comme simples citoyens et si ce n’est pas à leur dignité épiscopale qu’ils doivent l’honneur d’avoir été appelés au sein d’une assemblée politique : le chef du gouvernement exerce son droit de nomination comme il l’entend. Mais ce n’est pas l’Empereur, c’est la loi qui décide que tout cardinal est sénateur. Le banc des évêques est donc rétabli. Or, avons-nous une religion d’État ? Nous n’en avons pas, si j’en