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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/304

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difficulté au moyen de fidéi-commis ; car les fidéi-commis sont parfaitement légaux chez nos voisins ; mais qui ne voit qu’il y a, dans cette absence de reconnaissance légale, dans cette privation du droit direct de propriété, une humiliation, une source d’embarras, une cause permanente de pauvreté, surtout une cause d’inégalité flagrante avec la riche et puissante Église d’Angleterre, qui a ses lords au parlement et ses grands propriétaires terriens, et qui prélève sur tous les sujets britanniques le double impôt de la dîme et du Church-rate ? Le membre du clergé catholique qui est possesseur de terres, soit de son propre chef, soit par fidéi-commis, paye la dîme, comme les autres, au lord spirituel, et contribue, en payant sa part du Church-rate, à enrichir les fabriques des églises hérétiques. Cet état de choses paraît doublement vexatoire dans un pays dont la population presque tout entière professe le catholicisme[1]. En France, sous le premier Empire, les rabbins étaient payés au moyen d’une contribution imposée sur les israé-

  1. « En Irlande, les adhérents de l’Église établie n’excèdent pas le neuvième de la population, et cette petite minorité se compose presque entièrement des classes riches qui pourraient aisément se procurer l’instruction religieuse. Nous avons pourvu avec profusion aux intérêts spirituels des riches et du petit nombre, en négligeant complètement ceux des pauvres et de la multitude. Nous laissons le clergé des catholiques, c’est-à-dire de plus des cinq sixièmes du peuple, sans aucune subvention du gouvernement, dépendre pour son entretien des contributions volontaires de son troupeau, composé des paysans les plus pauvres de l’Europe.
     « En discutant l’état ecclésiastique de l’Europe, il faut toujours se souvenir que les objections des catholiques romains contre l’Église établie ne sont pas relatives au plus ou au moins, qu’elles ne seraient pas détruites par l’abolition de quelques évêchés, etc., mais qu’elles portent contre l’existence même, contre le principe d’une subvention de l’État en Irlande en faveur du clergé d’une très-petite minorité, aussi longtemps que le clergé de la majorité sera complètement dépourvu de tout secours provenant des fonds publics.
     « L’objection est relative au principe et non au degré, et rien qu’une parfaite égalité pour toutes les sectes religieuses ne satisfera les personnes dont le mécontentement est dû à ces causes. » (M. Mac-Culloch, Compte rendu de l’empire britannique, édit. de 1854.)