Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/55

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christianisme et dans l’empire où le christianisme était alors persécuté. De l’empereur Dioclétien jusqu’à l’empereur Anastase, les manichéens turent bannis, exilés, ruinés, condamnés à périr par divers supplices. Leur doctrine ne s’en répandit pas moins de toutes parts, malgré la persécution et peut-être à cause d’elle ; car une idée ne vit que par la vérité et ne périt que par l’erreur ; un des malheurs de la violence, c’est de n’atteindre jamais son but, et de donner souvent de la force à ce qu’elle veut détruire. Après Anastase, les manichéens respirèrent sous plusieurs règnes ; ils devinrent assez nombreux pour se diviser en sectes, et pour résister à des persécutions nouvelles, aussi sanglantes que les premières. On assure que l’impératrice Théodora fit mourir près de cent mille manichéens vers le milieu du neuvième siècle. Les survivants s’enfuirent au nombre de plus de quatre mille, s’unirent aux Sarrasins et ravagèrent avec eux les terres de l’empire. Les supplices leur donnaient de nouvelles recrues, et en auraient peut-être fait un peuple, s’ils n’avaient pas été écrasés dans une bataille où périt leur chef Chrisochir. Nous les retrouverons en France sous le nom d’Albigeois à la fin du douzième siècle. La longue durée du manichéisme nous a conduits bien loin du règne de Constantin ; avant de parler de l’hérésie de Pélage, qui date du cinquième siècle, il faut constater le court et terrible épisode de l’apostasie de Julien.