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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/67

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CHAPITRE IX.

Abélard.


Les erreurs d’Abélard se rattachent à une hérésie plus importante encore que celle d’Arius, parce qu’elle devait avoir des conséquences plus graves, sinon dans le monde des faits, au moins dans le monde de la pensée. C’est l’hérésie de Pelage, qui fut peut-être, au cinquième siècle, un précurseur de Luther. Au fond, toutes les hérésies, même les hérésies purement théologiques comme celles de Sabellius et d’Arius, sont une lutte, au nom de la liberté et de la raison, contre les mystères imposés. Elles sont un désir d’expliquer, un désir de comprendre, un désir de se posséder ; une tentative de la raison pour entrer en possession d’elle-même ; par conséquent une révolte contre l’intolérance.

Pelage est un moine anglais du cinquième siècle, dont la doctrine peut se résumer dans les quatre propositions suivantes : 1o L’homme peut vivre sans péché ; — non que la perfection existe en fait dans la vie humaine, car Pelage n’allait pas jusque-là, mais il soutenait qu’il n’est pas impossible, d’une impossibilité métaphysique, qu’elle existe. Cette opinion est contraire à l’autorité de l’Écriture, qui déclare qu’il n’y a point d’homme sans péché[1]. 2o Il n’y a point

  1. Év. selon saint Jean, I, 4.