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laquelle était déjà réuni leur monde, fort inquiet de ne pas les voir arriver.

Enfin, le bateau fut démarré au milieu de l’obscurité ; on avait jugé prudent de ne point allumer de lanterne : un brouillard épais et glacial couvrait la rivière ; par une triste fatalité, due à la précipitation, la barque alla se heurter contre des vases et des glaçons amoncelés dans l’eau. Après de vains efforts pour la dégager, Jean Le Coq et non Le Rey, comme l’a écrit M. Muret, sauta sur cet îlot décevant en poussant la barque, qui, par suite de cette vigoureuse impulsion, gagna l’autre rive ; mais ce fut aux dépens de sa vie que ce vaillant serviteur sauva celle de ses maîtresses : il disparut dans les ténèbres, sans pousser un cri, entraîné sans doute par le courant. Il y a de ces dévouements silencieux qui valent les actions les plus éclatantes !

Dieu sait les angoisses dont le cœur des pauvres fugitives fut serré en voyant sombrer leur courageux compagnon.

Il était temps d’arriver sur l’autre rive de la Vilaine, car on apercevait dans le lointain des lanternes, à travers la brume, et des hommes explorant les bords du fleuve. À quelques centaines de mètres, Mme Le Gris et Mme de Kerigant rencontrèrent les hommes de M. de la Prévalais, chargés de les accom-