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Page:Kinon - L’Âme des saisons, 1909.djvu/253

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LA NEIGE ET LES LAMPES


Suis, dans la nuit, le vent lugubre qui balaie
Interminablement la plaine congelée...
Il n’y a que le vent et la glace, il n’y a
Que le regard de feu d’Arcture et de Véga,
Il n’y a que le froid frénétique qui tue
En silence et qui veut la glace toute nue.

Pourtant si tu sais suivre, à travers le froid noir,
Le vent aigu, coupant comme un vaste rasoir,
Si, fendant avec lui le ténébreux espace,
Comme un lutin siffleur tu passes sur la glace
Pendant des mois entiers, ton œil verra soudain
Le ciel déchiqueté par un amas lointain
De monts neigeux, de pics et de glaciers qui brillent,
Avec leurs millions et millions d’aiguilles,
D’une clarté bleuâtre et d’un reflet changeant,
Sous les étoiles d’or et la lune d’argent.
C’est la terre. Elle dort, là-bas, dans le silence,
Parmi la vaste nuit et l’iceveld immense.

Aborde. Un râle creux gémit dans les glaciers
Et la neige durcie a grincé sous tes pieds.
Marche. Un entassement vitreux de blocs de glace
Et de rocs bruns et blancs où bâillent des crevasses.