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Page:Kinon - L’Âme des saisons, 1909.djvu/255

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LA NEIGE ET LES LAMPES


Blêmissant de la peur d’apercevoir, tu vas
Avec une ombre immense attachée à tes pas
Qui gesticule au loin ainsi qu’un géant ivre.
Dans la neige, à tes pieds, une chose de cuivre
Brille... C’est un compas. Plus loin gît un fusil.
Tu cours contre le vent qui chasse le grésil,
Halluciné, voyant tournoyer les étoiles...
Tu bouscules des choses molles. Une voile
De navire, des peaux, des vêtements épars,
Des instruments brisés semés de toutes parts,
Te conduisent devant l’ouverture d’un antre.
Très pâle, et comme dans un cauchemar, tu entres.
 
Ténèbres. Un scintil d’étoiles par les trous
Et les fentes du roc. Un souffle sourd et doux
D’on ne sait quoi qui dort dans l’ombre et qui ne bouge .
Soudain une lueur mystérieuse et rouge
Eclaire la caverne, et parmi les reflets
Qui dansent, vacillant du fauve au violet,
Tu distingues, énorme et remuante boule
De neige, un ours géant qui se réveille et roule
Des yeux bovins, chargés de sommeil et d’effroi.
Tandis qu’au fond, heurtant de son dos la paroi,
Un autre monstre, énorme et dressé sur deux pattes,
Montre ses dents de givre et sa langue écarlate,