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Page:Klapka - Trois Hommes en Allemagne, traduction Seligmann, 1922.djvu/214

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de l’affiche. Elle porte le costume rêvé pour faire de la bicyclette par de fortes chaleurs. Des patronnes d’auberges un peu bégueules lui refuseraient peut-être l’accès de leur salle à manger ; et une police à l’esprit étroit pourrait vouloir la protéger en l’enveloppant dans un châle, avant de l’incriminer. Mais elle ne s’occupe pas de ces détails. Par monts et par vaux, en des passages où un chat aurait du mal à trouver son chemin, sur des routes faites pour briser un rouleau compresseur, elle passe comme une vision de beauté nonchalante, ses cheveux blonds ondulant au vent, son corps de sylphide alangui dans une attitude éthérée, un pied sur la selle et l’autre effleurant la lanterne. Parfois elle consent à s’asseoir sur la selle ; en ce cas elle place ses pieds sur les leviers de repos, allume une cigarette et brandit un lampion.

Quelquefois, mais plus rarement, ce n’est qu’un mâle qui conduit la bicyclette. Acrobate moins accompli que la demoiselle, il réussit pourtant des tours de force appréciables : se tenir debout sur la selle en agitant des drapeaux, boire de la bière ou du bouillon en pleine marche. Il faut bien qu’il fasse quelque chose pour occuper ses loisirs : ce doit être fort pénible pour un homme d’un tempérament actif de rester tranquillement assis sur sa machine des heures durant sans rien avoir à faire, sans même avoir à réfléchir. Et c’est pourquoi on le voit se dresser sur ses pédales en arrivant près du sommet d’une haute montagne, pour apos-