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Page:Koschwitz - Les Parlers Parisiens, 1896.pdf/201

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l’explication, et le fait de suivre de nombreux extraits d’anciens auteurs poètes ou prosateurs qui l’ont employé.

Non seulement on suit ainsi chaque mot à travers les siècles, mais les citations font connaître, de la manière la plus exacte, les diverses acceptions dans lesquelles le mot a été pris. Cette méthode est excellente et ne laisse aucun doute dans l’esprit sur la signification vraie et réelle des mots de notre ancien français.

Nous ne serions pas quitte envers M. Favre si nous nous bornions à constater l’irréprochable exécution matérielle de l’immense livre qu’il a entrepris ; il faut dans son ouvrage réserver une large part au savoir philologique, aux connaissances littéraires. On ne pouvait pas se borner à imprimer avec fidélité le maniscrit de Sainte-Palaye ; il était indispensable d’y joindre des notes propres à indiquer les progrès et les transformations que la science philologique a réalisés depuis la fin du xviiie siècle. En outre, la disposition de chacun des articles du Dictionnaire, le catalogue des variantes orthographiques traversées par chacun des mots, réclamaient quelque chose de plus que l’habileté d’un typographe consommé ; il fallait un philologue, un homme familier avec les monuments de l’ancien idiome et avec toutes les questions que cette étude a successivement fait naître. M. Favre a été incontestablement à la hauteur de son entreprise. Il a donc moins fait œuvre d’éditeur, dans l’acception ordinaire du mot, que de philologue et de savant. Aidé par un spécialiste de grand mérite, M. Pajot, archiviste paléographe, il a pu triompher de maintes difficultés, et ce labeur immense et complexe n’a cependant été l’œuvre que de sept années. Quant à la condition matérielle du livre, elle est irréprochable ; aucuns soins, aucuns frais n’ont été épargnés. On sent que l’éditeur n’a point voulu faire une simple spéculation, mais bien plutôt élever à notre langue un monument durable et digne de gagner les siècles à venir.

La notice biographique sur Lacurne de Sainte-Palaye, rédigiée par L. Favre, est un document d’une réelle valeur historique et littéraire. Il y a joint diverses autres pièces non moins intéressantes, parmi lesquelles on ne peut se dispenser de citer les Curiosités françoises, ou recueil de plusieurs belle propriétez, avec une infinité de proverbes et quolibets, pour l’explication de toutes sortes de livres, par Antoine Oudin. Rouen et Paris, Antoine de Sommaville, MDCLVI.

Cette espèce de dictionnaire du bas langage occupe les pages 204 à 373 du tome X et fait excellemment suite au Glossaire de Sainte-Palaye.

Enfin le dernier volume se termine par une bibliographie complète des ouvrages imprimés de La Curne et par une liste d’environ cent manuscripts de notre auteur conservés à la Bibliothèque nationale et à celle de l’Arsenal.

Il n’est pas un érudit, pas une personne s’occupant d’études historiques et philologiques, de recherches dans les archives, dans les cartulaires, dans les chartes en langue vulgaire du XIe au XVIe siècle, ou voulant connaître la signification et l’origine des termes employés par nos vieux chroniqueurs et nos anciens écrivains, qui ne soient desireux de posséder le Dictionnaire de Lacurne de Sainte-Palaye.