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Page:Koschwitz - Les Parlers Parisiens, 1896.pdf/21

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stater et de bien examiner toutes les prononciations existant dans les différentes classes et les différentes régions, et comme les parlers familiers ou populaires avec leurs nombreuses évolutions phoniques ont beaucoup plus d’intérêt pour la vie des langues que les parlers plus ou moins artificiels de la bonne compagnie, il est naturel que les phonéticiens préfèrent l’étude de la langue familière à celle du soi-disant bon usage. Ce n’est pas leur faute, si, ensuite, il se trouve des étrangers qui prennent leurs observations pour une révélation de la seule prononciation à suivre et adoptent ainsi la prononciation des voyous parisiens combinée, peut-être, avec le lexique des romanciers naturalistes les plus avancés.

En somme, l’immense majorité des lexicographes, orthoépistes et phonéticiens français et étrangers, ainsi que presque tous les Français de la province qui tiennent à avoir une bonne prononciation, sont d’avis que l’usage modèle doit être cherché uniquement dans la bouche des Parisiens bien élevés. En dehors des quelques partisans de la langue des anciennes petites résidences de la France, je n’ai trouvé que peu de dissidents. L’un est M. J. P. A. Martin, le seul phonéticien provincial que possède la France. Dans sa petite brochure: Parole et Pensée[1], il s’exclame: „Mais nous nous demandons quel intérêt nous pourrions bien avoir à forcer une partie de la population à prononcer …: râge, pâge, râtion, pâille, quand ell prononce: rage, page, ration, paille, en donnant aux a la même valeur que dans panade. À quoi bon cette uniformité de prononciation? Pourquoi vouloir établir une tyrannie phonétique? … Les habitants du Midi préfèrent

  1. Pontoise 1889, p. 10 s.