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Pauvre ménage.

L’omnibus de Ménilmontant descend au trot de ses forts chevaux la rue Oberkampf. Cette rue est une longue percée rectiligne à travers les maisons hautes, étroites, toutes trouées de petites fenêtres, qui semblent se dominer les unes les autres à mesure que le regard remonte vers le faubourg. Il pleut, le pavé glisse, les trottoirs moroitent. Des gens et des gens passent, s’écoulent en rebroussant le courant ou en le suivant; ils se coudoient avec des cris, des appels, des rires; les parapluies de toute taille, marrons, noirs, verdâtres, grouillent dans la cohue, se renversant pour laisser passer, déchirés par endroits et montrant des pointes de baleines nues et menaçantes. Des hommes en blouse, les mains dans les poches du pantalon, se font un passage à coups de coude et bousculent les parapluies; on se serre un moment contre les maisons, quand une lourde voiture rase le bord du trottoir; le flux perpétuel des passans est suspendu une seconde, comme étranglé, puis reprend. Tous marchent, trottent, s’arrêtent à une échoppe le temps de crier un: bonsoir la compagnie! puis répartent, ou enfilent un corridor ou disparaissent au tournant d’une rue. Que de rues on aperçoit ainsi,