Page:Kropotkine - L Entraide un facteur de l evolution, traduction Breal, Hachette 1906.djvu/183

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telets, les assemblées des communes, appliquant le droit coutumier, restent souveraines pour une part importante des affaires. La loi de l’État permet au roi de mettre à mort n’importe qui pour un simple caprice, ou même simplement pour satisfaire sa gloutonnerie ; mais le droit coutumier du peuple continue de maintenir le réseau d’institutions de soutien mutuel, qui se retrouvent chez d’autres barbares et ont existé chez nos ancêtres. Chez quelques tribus plus favorisées (dans le Bornou, l’Ouganda, l’Abyssinie et surtout chez les Bogos), certaines dispositions du droit coutumier dénotent des sentiments vraiment empreints de grâce et de délicatesse.

Les communes de village des indigènes des deux Amériques ont le même caractère. On a trouvé les Toupis du Brésil vivant dans de « longues maisons », occupées par des clans entiers cultivant en commun leurs champs de blé et de manioc. Les Aranis, d’une civilisation bien plus avancée, avaient l’habitude de cultiver leurs champs en commun ; il en est de même pour les Oucagas, qui sous un système de communisme primitif et de « longues maisons », avaient appris à bâtir de bonnes routes et à cultiver diverses industries domestiques[1], tout aussi développées que celles du commencement du moyen âge en Europe. Toutes ces peuplades vivaient sous le régime d’un droit coutumier semblable à celui dont nous avons donné des exemples dans les pages précédentes. A une autre extrémité du monde nous trouvons la féodalité malaise, mais cette féodalité a été impuissante à déraciner les negarias, ou communes villageoises dont chacune possède en commun au moins une partie de la terre, et qui, quand la nécessité se présente, font

  1. Waitz, III, 423 et suiv.