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Page:Kropotkine - L Entraide un facteur de l evolution, traduction Breal, Hachette 1906.djvu/236

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comparer la guilde à un syndicat ouvrier ou une trade-union moderne, dépouillés de tous les attributs de la souveraineté de l’État et réduits à quelques fonctions d’importance secondaire, est aussi peu raisonnable que de comparer Florence ou Bruges à une commune française, végétant sous le Code Napoléon, où à une ville russe placée sous la loi municipale de Catherine II. Toutes deux ont des maires élus, et cette dernière a aussi ses corporations de métiers ; mais la différence est — toute la différence qu’il y a entre Florence et Fontenay-les-Oies ou Tsarevokokchaisk, ou encore entre un doge vénitien et un maire moderne qui tire son chapeau devant l’employé du sous-préfet.

Les guildes du moyen âge savaient maintenir leur indépendance ; et, plus tard, particulièrement au XIVe siècle, lorsqu’à la suite de plusieurs causes que nous allons bientôt indiquer, la vieille vie municipale subit une profonde modification, les jeunes métiers se montrèrent assez forts pour conquérir leur juste part dans la gestion des affaires de la cité. Les masses, organisées en arts « mineurs », se soulevèrent pour ôter le pouvoir des mains d’une oligarchie grandissante, et la plupart réussirent dans cette tâche, ouvrant ainsi une nouvelle ère de prospérité. Il est vrai que dans certaines cités le soulèvement fut étouffé dans le sang, et qu’il y eut des exécutions en masse d’ouvriers, comme cela arriva à Paris en 1306 et à Cologne en 1371. En ces cas-là les franchises des cités tombèrent rapidement en décadence, et la cité fut soumise graduellement par l’autorité centrale. Mais la majorité des villes avait conservé assez de vitalité pour sortir de cette lutte avec une vigueur et une vie nouvelles. Une nouvelle période de rajeunissement fut leur récompense. Il y eut un regain de vie qui se manifesta par de splendides