Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/120

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Quant au peuple, dès que la nouvelle de la fusillade se répandit dans la ville, il agit, sans ordres de personne, guidé par son instinct révolutionnaire. Il amena à l’Hôtel de Ville les canons dont on s’était emparé aux Invalides, et vers trois heures, lorsque la députation de Corny revenait rendre compte de son échec, elle rencontra environ trois cents gardes-françaises et une quantité de bourgeois armés, commandés par un ancien soldat, Hulin. Ils marchaient à la Bastille, suivis des cinq pièces de canon. À ce moment, la fusillade durait déjà depuis plus de trois heures. Le peuple ne se laissait pas décourager par le grand nombre de tués et de blessés[1] et continuait le siège, ayant recours à différents expédients ; ainsi on amena deux charrettes de paille et de fumier pour faire un rideau de fumée qui faciliterait l’assaut des portes d’entrée (au petit et au grand pont-levis). Les bâtiments de la cour du Gouvernement avaient été déjà incendiés.

Les canons arrivaient juste au bon moment. On les traîna dans la cour du Gouvernement et ils furent placés en face des ponts-levis et des portes, à 30 mètres seulement de distance.

On imagine facilement l’effet que ces canons, aux

    ment, que le peuple se retirât d’abord de la cour du Gouvernement, sur quoi la députation d’engager le peuple à se retirer. (Cf. Boucheron, cité par Flammermont, p. CCXIV, note.) Heureusement le peuple se garda bien d’obtempérer à leurs désirs. Il continua l’assaut. Il comprit si bien qu’il n’était plus temps de parlementer, qu’il maltraita ces messieurs de la députation ; on parla même de les tuer comme des traitres (Boucheron, l.c., p. CCXVI, note, et Procès-Verbal des Électeurs).

  1. 83 tués sur place, 15 morts de leurs blessures, 13 estropiés, 60 blessés.